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Dans le monde professionnel, les temps calmes disparaissent de plus en plus au profit d’une effervescence où les salariés doivent toujours être plus performants et plus productifs.

De nombreux salariés avouent ne pas vouloir quitter leur job, notamment au regard du contexte géopolitique et économique. Ils décident ainsi de rester à leur poste, mais de « lever le pied » pour ne faire que le strict minimum.

Ces « partisans du moindre effort », comme souvent nommés dans les médias, ont donné naissance au « Quiet Quitting », une tendance récemment popularisée sur les réseaux sociaux. En effet, depuis quelques mois, ce phénomène fait beaucoup parler de lui et commence ainsi à inquiéter les entreprises, qui craignent que le manque d’implication des salariés ne se répercute sur la productivité.

Alors pourquoi le « Quiet Quitting » prend-il de l’ampleur ? Quels sont les facteurs qui expliquent ce désengagement de la part des salariés ? Et enfin, doit-on y voir une sorte de désabusement, ou plutôt un besoin de rééquilibre entre vie personnelle et vie privée ? On fait le point.

 

Le « Quiet Quitting » c’est quoi ?

Ce phénomène, traduit en français par « démission silencieuse », secoue le management au sein des entreprises. Mais de quoi s’agit-il exactement ? Car malgré la traduction, il n’est pas question de démissionner à proprement parler.

 

Les origines du phénomène

En avril 2021, Weibo, le Twitter chinois, voit apparaître, avant d’être censuré par les autorités chinoises, le hashtag #TangPing, rassemblant des milliers d’adeptes. Cet hashtag signifie « rester allongé ». Il propose de lever le pied, mettant en avant un ras-le-bol de la culture du travail intensif.

Ce phénomène réapparaît en 2022 aux États-Unis avec le hashtag #QuietQuitting, avant d’arriver au Royaume-Uni et en France. Avec une multitude de vidéos postées sur TikTok, la tendance prend de plus en plus d’ampleur dans le monde du travail.

Des vidéos atteignant les 3 millions de vues conseillent aux convaincus d’adopter la « démission silencieuse au travail » : respect des horaires à la minute, effectuer uniquement les missions listées sur le contrat de travail, ne pas venir en aide à ses collègues de travail, etc.

 

Le « Quiet Quitting » dans les faits  

Le concept du « Quiet Quitting » consiste à rester en poste et à ne faire au travail uniquement ce qui est stipulé sur sa fiche de poste. Ainsi, il n’est pas question de faire des heures supplémentaires, ou encore de prendre des initiatives. Il est plutôt question de faire barrage à un monde qui met en avant le dépassement de soi.

En résumé, c’est faire juste ce pour quoi on est payé, mais sans toutefois bâcler son travail.  

 

Les différents facteurs

La crise sanitaire
Cette tendance naît après la crise sanitaire et les différents confinements, qui ont bouleversé les habitudes des travailleurs et qui ont soulevé de nombreuses questions.

Le « Quiet Quitting » est une conséquence directe de la déconnexion progressive au monde professionnel. En étendant la pratique du télétravail, la crise sanitaire a mêlé environnement personnel et environnement professionnel, nécessitant ainsi une certaine réorganisation des priorités.

En effet, la démocratisation du télétravail a démontré qu’une autre façon de travailler tout en restant performant, était tout à fait possible. Les jeunes actifs sont d’ailleurs les premiers à revendiquer ce mode de travail : selon une étude de l’ADP Research Institute publiée en 2022, « 53 % des 18-24 ans envisageraient de quitter leur entreprise si leur employeur leur imposait un retour au 100 % présentiel ».

 

La perte de sens
Parmi les différentes questions et remises en cause des travailleurs, on retrouve également le sens de leur job au quotidien. En effet, de nombreuses études ont analysé la perte de sens au travail. De plus en plus de salariés sont démotivés et désabusés et ne voient plus l’utilité de leur travail.

 

Mouvement « Quiet Quitting » : faut-il réellement s’inquiéter ?

Image par Mohamed Hassan de Pixabay

 

La culture d’entreprise
Aussi, les crises géopolitiques, sanitaires, économiques, sociales et écologiques poussent les actifs à s’interroger sur leur rôle au sein de la société et sur les valeurs de l’entreprise pour laquelle ils travaillent. Fabrique-t-elle des produits de bonne qualité ? Quel est son impact sur l’environnement ? Certains critères sont devenus plus importants avec le contexte dans lequel nous vivons.

 

Le bien-être au travail
Plusieurs facteurs peuvent conduire à cette tendance des employés qui se désengagent de manière silencieuse. La qualité de vie au travail pèse de plus en plus dans la balance. En effet, les jeunes générations sont prêtes à s’engager pour une entreprise, mais pas à n’importe quel prix ! Et il ne s’agit pas uniquement de condition financière. Ils privilégient aussi le bien-être au travail, avec des horaires souples et une certaine flexibilité de télétravail.  

 

Pourquoi les entreprises s’inquiètent ?

La tendance atteste d’une baisse de motivation et donc d’un faible engagement de la part des salariés.

Ainsi, le « Quiet Quitting » peut se révéler inquiétant. Car, comment nier l’importance de l’engagement et de l’entraide au bon développement de l’entreprise ? Comment cette dernière peut-elle fonctionner avec un travail qui n’est envisagé uniquement de manière « minimaliste » ? C’est typiquement ce qui inquiète les entreprises…

 

Un rapport de force qui s’inverse

Le nouveau monde qui se dessine, le monde post-pandémique plongé qui plus est dans la guerre en Ukraine, est marqué par l’inversion des rapports de force entre les employeurs et les employés. Les mentalités évoluent et les relations entre l’entreprise et ses salariés changent.

Avec un nombre croissant de démissions, des critères de motivation et des priorités qui changent profondément, le rapport de force devient de plus en plus favorable aux employés. Les entreprises font face à une pénurie de talents et doivent désormais se montrer attractives pour séduire de nouveaux collaborateurs.

Les abus du passé ne pourront plus continuer.  

 

« Quiet Quitting » : désabusement ou besoin d’équilibre vie pro vie perso ?

Le phénomène peut toucher les salariés, indépendamment de leur âge, qui sont démotivés et fatigués, à la limite du burn-out. Ils décident de réduire leur rythme de travail et leur investissement dans l’entreprise, notamment pour se protéger.

 

Mouvement « Quiet Quitting » : faut-il réellement s’inquiéter ?

Image par Mohamed Hassan de Pixabay

 

Est-ce vraiment inquiétant que les travailleurs ne souhaitent plus « surperformer » en entreprise ? Car finalement, ils font tout de même ce pour quoi ils ont été embauchés et ce pour quoi ils sont rémunérés.

Les médias donnent une ampleur négative au mouvement, au moment-même où les tensions entre employeurs et employés sont à leur paroxysme : réforme des retraites, inflation fulgurante et pénurie de talents, réforme de l’assurance chômage, etc.

Et si c’était tout simplement une manière de remettre en cause notre façon de travailler ? Et si les salariés disaient simplement STOP à la course à la performance et à la croissance à tout prix ?

 

Un désabusement certain

Le travail c’est la santé qu’ils disaient ! Le phénomène « Quiet Quitting » est aux antipodes du contrat social contemporain. Car le travail, qui est censé nous épanouir et nous permettre de nous développer, est malheureusement rarement épanouissant, et rarement rémunéré à sa juste valeur

Par ailleurs, le « Quiet Quitting », c’est également l’idée d’arrêter d’aller au-delà de ce qui est attendu, soit dans l’espoir d’une promotion, d’une augmentation, ou encore d’une reconnaissance.  

Ainsi, le « désintérêt » que ressentent beaucoup de collaborateurs peut s’expliquer notamment par un manque de considération financière et de reconnaissance dans leur travail. Les adeptes du mouvement renoncent à la culture de la performance absolue. La tendance au « Travailler plus pour gagner plus » se transforme désormais en « Travailler moins mais mieux ».

 

La recherche d’un équilibre entre vie pro et vie perso

Le « Quiet Quitting » reflète également une prise de conscience, désormais exprimée : les salariés enclenchent un processus de changement profond des mentalités au sujet de la place du travail dans leur vie. Alors que 60% des salariés conféraient au travail une place très importante en 1990, ils n’en sont aujourd’hui plus que 20%.

Dans le contexte mondial que nous connaissons, affirmer son droit à la déconnexion paraît plutôt légitime. Les salariés refusent l’épuisement professionnel et décident de ne plus sacrifier leur vie personnelle au profit de l’économie.

Ainsi, le « Quiet Quitting » prône l’idée de poser des limites à la place que prend le travail dans la vie. Le travail n’est plus tellement au centre des priorités, et il s’agit bien là d’un problème d’époque, plus que générationnel.

Aujourd’hui les individus ont compris plus que jamais, l’importance du rééquilibrage entre la vie perso et la vie pro.

Le mouvement a été accueilli de manière assez négative dans les médias et sur les réseaux, mais en fin de compte, entre le Covid, la sécheresse, la guerre en Ukraine et une inflation incontrôlable, il n’est pas si étonnant. Il semble plutôt logique que notre rapport au travail soit totalement transformé.

Finalement le « Quiet Quitting » est une réalité avec laquelle les entreprises devront désormais composer.

 

Les entreprises devront s’adapter

De nombreuses entreprises s’inquiètent de ce mouvement et d’autres ont compris qu’elles devront sortir des impératifs de productivité et de performance à tout prix, et proposer au contraire un nouveau mode de travail, plus durable et plus motivant.

Les entreprises doivent revoir leur mode de fonctionnement si elles souhaitent retenir leurs effectifs et en attirer de nouveaux. Quelques pistes sont à étudier…

Transformer l’environnement de travail

Certaines entreprises essaient d’adopter la semaine de 4 jours, d’autres s’équipent de baby-foot. Peut-être que la recette est simple : construire des environnements de travail que les salariés n’ont pas envie de fuir ! Car un employé qui se sent bien est forcément plus motivé.

Par ailleurs, il est important que la communication soit claire et que le management soit à l’écoute des collaborateurs. En évitant les stress inutiles et en respectant le temps de travail de chacun (même en télétravail), l’environnement devient plus sain et plus vivable. Les employés ont davantage envie de s’impliquer.

 

Augmenter les possibilités de formation et d’évolution

Pourquoi un employé devrait-il se tuer à la tâche, surtout s’il n’a aucune perspective d’évolution ?

Certaines entreprises doivent changer leurs mauvaises habitudes et accompagner les ambitions de leurs employés. Elles doivent désormais être en mesure de proposer des formations pour développer les compétences de leurs collaborateurs et accroître leurs possibilités de promotion et d’augmentation.    

 

Finalement, avec un peu de recul, l’affolement général des entreprises au regard du « Quiet Quitting » paraît quelque peu ridicule… Est-il si impensable de changer notre vision du travail en lui donnant une place un peu moins centrale dans nos vies ?

Pour rappel, le mouvement n’est pas de bâcler son boulot et de saper la croissance de l’entreprise, mais juste de réaliser sa tâche professionnelle telle que définie dans son contrat de travail, ni plus, ni moins.

Peut-être que les « quiet quitters » tirent la sonnette d’alarme, nous indiquant qu’il est grand temps que le monde du travail évolue !  

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